SansCrierArt: Aperçu critique de l'actualité culturelle. Comptes-rendus d'expositions, de pièces de théâtre, de films et de tous autres évènements culturels.
L'histoire d'une transfuge de classe du XVIIIe contée par une transfuge de classe du XXe siècle. Maïwenn ne s'en cache pas. Sur de nombreux points, elle se sent proche de Jeanne du Barry. Cette paysanne, mal née mais éduquée qui devient la favorite du roi, ressemble à celle qui fut la favorite du nabab du cinéma. Ainsi, la réalisatrice propose un portrait, parcellaire et romancé, de la courtisane-comtesse dans lequel la comédienne se met en scène avec complaisance.
Dès les premières minutes du film, le simplisme dans l'écriture du récit dit par la voix off surprend tandis que la qualité de la photographie, des décors et des costumes réjouissent. Ces deux impressions perdureront pendant tout le film. Les dialogues ne brillent pas, et surtout pas ceux du Roi (Johnny Depp, très bien) qui ne parle quasiment pas. Le récit oscille entre Versailles pour les Nuls et romance à l'eau de rose, avec les méchants très méchants et le petit personnel complice. Mais, curieusement, la réalisation efficace s'empare de Versailles et donne à voir, son immensité baignée de lumières comme ses recoins, dans l'ombre, pour aimer ou pour comploter. Pour qui connait l'oeuvre de Maiwenn, le rythme posé, presque lent surprend. On ne s'ennuie pas tout à fait mais on ne se passionne pas non plus. Tout semble anecdotique jusqu'à la présence dans des seconds rôles aux partitions restreintes de Marianne Basler, Noémie Lvovsky, Pascal Grégory et Micha Lescot. Les prestations de Benjamin Lavernhe, d'India Haïr, de Melvin Poupaud et de Pierre Richard, qui bénéficient de plus de visibilité, ravivent un peu notre intérêt. Mais l'interminable épisode final sur la mort du roi achève de confirmer le faible intérêt de cet ouvrage.
Damien dit Dog et Mirales zonent et dealent au Pouget. Dog subit l'emprise de Mirales, toujours prompt à l'humilier. Quand Elsa s'installe dans la petite ville, Dog, amoureux, prend ses distances avec Mirales.
La première qualité du film est l'excellence de son casting. La révélation Raphaël Quenard, impressionnant dans le rôle du grande gueule et humiliant Mirales soudainement touché par le sentiment d'abandon et Anthony Bajon une fois de plus très grand en adulescent un peu paumé. Ils sont entourés par deux belles comédiennes, la plus que prometteuse, Galatea Bellugi et l'immense Dominique Reymond.
La seconde qualité du film, parfaitement servie par la première, est la qualité de son écriture. Le portrait d'une jeunesse paumée entre ruralité et banlieue, paralysée par une langueur monotone et des certitudes sur les limites qui s'imposeraient à elle, est parfaitement dessiné. A cela s'ajoute des accents Becketiens dans le duo Dog-Mirales qui navigue entre emprise et amitié plus forte que tout.
Jeanne Dielman, veuve, vit avec Sylvain, son fils adolescent à Bruxelles. Sa vie d'une grande routine est ponctuée par les tâches ménagères et par la visite des clients de son activité de prostituée.
Jeanne Dielman..., tourné en 1975, a été élu le 1er décembre 2022, "meilleur film de tous les temps" au classement décennal de la revue britannique Sight and Sound. Hasard ou conséquences, le film restauré ressort en salle, l'occasion de vérifier les raisons de cet étrange et audacieux prix.
Le film porte une forte personnalité formel. Il est construit en plans fixes que la divine Delphine Seyrig habite et traverse. La colorimétrie est pâle. Blanc, beige, marron, jaune paille et bleu gris dominent. Les bruits de la vie domestique envahissent l'espace sonore. Les dialogues sont réduits au minimum. Quand la parole vient c'est par la voix de Delphine Seyrig ou par celle d'une voisine anonyme sur des considérations domestiques ou par celle de l'adolescent qui s'interroge sur les relations charnelles.
Ainsi les tâches quotidiennes répétitives, maîtrisées, sournoisement alienantes, forment la vie en huis clos (appartement et commerces du quartier) de Jeanne Dielman. Mais, petit à petit, l'expression sur le visage de Jeanne change, la mécanique semble se gripper.
Difficile de dire que Jeanne Dielman est le meilleur film de tous les temps (si ce classement a un sens). Il est en tous cas remarquable, nous tenant en haleine pendant ses trois heures de plongée au coeur de la vie de Jeanne Dielman.
Nawell, Grégoire et Sabine ont été victimes de vols avec agression. Issa, Nassim et Thomas sont en prison pour faits de vols et braquages. Ils vont être réunis par les services de la Justice Restaurative.
Après Pupille, consacré à l'adoption, Jeanne Herry traite d'un autre service public méconnu. Tout comme pour son précédent film, elle s'arme d'une troupe de très bons comédiens qu'elle semble, tel un chef d'orchestre, pousser à l'excellence de Stradivarius.
A cette grande direction d'acteurs, s'ajoute l'intelligence de l'écriture et la maîtrise du récit. En moins de 2 heures, elle parvient à expliquer les contours, objectifs et limites de la Justice Restaurative et le rôle des différents intervenants sans tomber dans le docu-fiction. A cela s'ajoute le dessin de chacun de ses personnages de fiction sans qu'à aucun moment l'effet catalogue ou démonstratif ne prenne le dessus sur l'intensité du propos. Au récit sur le groupe de parole, la réalisatrice - scénariste ajoute l'histoire de Chloé qui fait également appel à la justice Restaurative dans une démarche plus personnelle et intime. Ainsi, Jeanne Herry alterne les deux récits cassant tout risque d'ennui et donnant du rythme au film. Elle anticipe même dans un propos final une réponse à ceux qui verraient dans son film trop de naïveté.
En termes de réalisation, aucune esbroufe mais le sujet tel qu'il est traité n'en nécessite pas. Les plans fixes sur les visages et les champs contre-champs font une totale confiance aux comédiens. Et avec raison. Gilles Lellouche confirme, si on en doutait encore, qu'il est un très grand comédien. Tout comme Leila Bekhti, Adèle Exarchopoulos, Élodie Bouchez et Miou Miou. Ils sont entourés de trois transfuges de la Comédie Française, Suliane Brahim, Denis Podalydes, Birane Ba, et de Jean-Pierre Darroussin, Fred Testot, Dali Benssalah, Anne Benoît, également très justes.
Le duo de producteur-distributeur Rassam-Seydoux propose une nouvelle adaptation en deux parties du best seller d'Alexandre Dumas Père.
Le premier opus, D'Artagnan, conte la rencontre du jeune Gascon (François Civil, juvénile) avec les trois mousquetaires Athos (Vincent Cassel, sobre), Aramis (Romain Duris, très looké) et Porthos (Pio Marmai, goguenard), ainsi que l'histoire des ferrets de la reine (Vicky Krieps, tout en fragilité). Les scénaristes ont ajouté une accusation d'assassinat pour Athos, une bisexualité pour Porthos et une tentative d'attentat contre le roi Louis XIII (Louis Garrel, à la fois drôle et génialement gênant) dans le contexte de guerre latente entre protestants et catholiques.
Cela ne suffit pas à rendre l'histoire passionnante.
La photo marronnasse, sans doute pour faire époque, est assez vilaine. La réalisation qui mise tout sur le mouvement, quitte à perturber la perception de l'action, nuit à la lecture du film. Tout semble brouillon. La chorégraphie des scènes semble aléatoire.
Ainsi, passé l'amusement de découvrir la pléiade d'acteurs, dont Eric Ruff, méconnaissable en cardinal de Richelieu, Lyna Khoudri en Constance, Marc Barbé en Capitaine de Treville, Patrick Mille en Comte de Chalais et Eva Green, parfaitement veineuse en Milady, sur laquelle sera centré le second opus, le film, sans audace, ennuie un peu.