SansCrierArt: Aperçu critique de l'actualité culturelle. Comptes-rendus d'expositions, de pièces de théâtre, de films et de tous autres évènements culturels.
Adam, fils de pêcheur, reçoit une bourse pour intégrer l'université islamique sunnite Al-Azhar au Caire. Quand le Grand Imam meurt, Adam se trouve mêlé aux manœuvres mises en place pour faire élire son successeur.
Tarik Saleh, après avoir dénoncé la corruption généralisée dont celle policière dans Le Caire Confidentiel, traite ici de l'emprise du pouvoir politique sur le pouvoir religieux en Egypte.
Ce thriller haletant est ainsi prétexte à souligner la terreur qui règne dans une Egypte contemporaine gangrénée au niveau de tous les pouvoirs et où l'homme de foi se perd dans une guerre secrète.
Le film se regarde avec intérêts, sans ennui mais sans réels frissons. Cela est sans doute dû aux côté Pieds Nickeles de certains personnages et aux invraisemblances de scénario.
La Conspiration du Caire vaut ainsi plus pour ce qu´il dénonce que pour ses qualités formelles.
1663, Molière triomphe avec L’Ecole des femmes. Ce succès déchaîne les critiques auxquelles Molière répond par un pamphlet sur l'art de la comédie avec La Critique de l’Ecole des femmes.
Pour sa troisième intervention à la Comédie Française, Julie Deliquet (Fanny et Alexandre, Vania) propose une création dans laquelle elle plonge les spectateurs dans l'intimité de la troupe de Jean-Baptiste Poquelin.
Molière (Clément Bresson) y est entouré de ses comédiens, Madeleine Béjart (Florence Viala) et sa fille Armande (Adeline d'Hermy), jeune épouse du maître, la marquise du Parc (Elsa Lepoivre), Mlle de Brie (Pauline Clément), Guillaume Brécourt (Laurent Stocker), Philibert du Croisy (Serge Bagdassarian) et La Grange (Sébastien Pouderoux). De la vie quotidienne de la troupe aux répétitions, du partage des gains jusqu'aux débats sur l'intention des écrits du maître, Julie Deliquet interroge le collectif en mettant en scène ce qu'aurait pu être les échanges des créateurs de la Comédie Française.
Julie Deliquet glisse dans la bouche des comédiens, ceux de Poquelin et ceux du Français, des réflexions sur l'esprit de troupe dans ce qu'il demande aussi de sacrifice, sur l'organisation et la hiérarchisation du groupe, mais aussi sur la misogynie ou non de Molière, sur la puissance de la comédie et l'élégance de la tragédie, sur le besoin viscérale de jouer, sur le statut des comédiens dans la société, sur la classification des publics... Et ce avec force conviction mais aussi beaucoup d'humour.
Dans un très beau décor sur deux étages, où les déplacements sont nombreux, où l'espace est sans cesse, dans son entier, occupé, le mouvement, horizontal et vertical, règne en maître. Oscillant entre éclairage maximal, salle comprise, et éclairage à la bougie, le travail sur la lumière est aussi très précis. La sonorisation en fond est constante, que ce soit les bruits de la foule et des feux d'artifice de la Saint-Jean aux klaxons des voitures qui nous ramènent à notre siècle (et à la relève des jeunes comédiens).
La troupe du Français est ici, encore, impressionnante. Le spectateur oublie vite qu'il s'agit d'une reconstitution tant, sous ses yeux, Jean-Baptiste, Madeleine, Armande et les autres explosent de vie, et de fièvre de jouer, à moins que ce ne soit Clément, Florence, Adeline, Elsa, Serge et les autres...
La mise en abîme touche à son paroxysme dans la seconde partie de la pièce dédiée à L'Impromptu de Versailles qui voit Molière et ses comédiens répéter. Là aussi, l'incarnation est si forte, la proximité des interprètes et de leur personnage est telle, qu'on plonge totalement dans cette création à l'infini.
Dans les années 80, l'émergence du Hip-Hop en France raconté à travers l'histoire de Bruno Lopez et Didier Morville, de la graffeuse Lady V et du DJ Dee Nasty.
La série prend la forme d'une saga contant l' époque des disquaires, des premiers tags, des premières radios libres, des battle de break dance, des fêtes sur les terrains désaffectés, du service militaire...
Elle fait ainsi le portrait d'une jeunesse française métissée à l'origine d'un mouvement artistique majeur qui s'est essentiellement développé dans la rue. Le récit se déploie lentement, prenant le temps de laisser entendre les premiers raps, voir l'apprentissage de la danse, du graf et comprendre les multiples obstacles à surmonter. L' ambiance des années 80 et l'art de la démerde sont bien rendus. Les comédiens sont très bons avec en tête Anthony Bajon et Melvin Boomer dans les rôles des NTM.
Sylvie qui anime des ateliers en prison épouse Michel l'un de ses "élèves". Son fils Abel soupçonne Michel de ne pas être tout à fait honnête.
Louis Garrel s'inspire de l'histoire de sa mère, Brigitte Sy, et la transforme en comédie matinée de thriller. Le théâtre est au coeur de son récit. Ici tous les personnages jouent à être un autre ou plusieurs autres, pour masquer leurs sentiments, pour se préserver ou protéger l'être aimé, pour braquer. Les comédiens sont parfaitement dirigés dans une partition exigeante qui, mêlant les genres, n'autorise pas l'à peu près. Roschdy Zem, Jean-Claude Pautot, Yanisse Kebab et Louis Garrel sont excellents. Et les filles, Anouck Grinberg, qui a tant manqué au cinéma ces dernières années, et Noémie Merlant, décidément toujours épatante, illuminent le film.
Dans une écriture rythmée et une réalisation offrant de belles idées de mises en images, Louis Garrel présente sans doute son meilleur film. L'innocent, à la fois drôle, haletant et sensible, offre en 1h40, une grande bouffée d'air frais.
Le musée d’Art moderne de Paris nous convie à une exploration le long du fleuve Rio Grande (ou Rio Bravo) qui sépare les Etats-Unis et le Mexique. Zoe Leonard s´est installée, de 2016 à 2021, dans la région pour photographier ce fleuve-frontière, l'urbanisation dans cette nature sauvage, la traversée du fleuve par le bac, la surveillance par caméras et hélicoptères. 300 photos en noir et blanc sont ici exposées dans une installation soigneusement pensée par l´artiste.
Paysages désertiques, mur frontière, fleuve, camions et voitures habitent les photos. L'humain n'apparaît quasiment pas, ou au loin ou par les images d'une caméra de surveillance. Les photos se succèdent parfois en série de 4, le regard de la photographe suivant un cavalier, une voiture, un axe routier. Les photos semblent souvent prises par une photographe cachée, sur un promontoire ou derrière une végétation. La photo est parfois floue.
Le visiteur pourra rester dubitatif devant ce témoignage qui pose plus de questions sur l'intérêt de sa forme que sur le sujet qu'il est censé documenter.
PS : la visite sera l'occasion de voir le travail l'installation "Le poumon et le cœur" de l'artiste portugais Francisco Tropa.